dimanche 6 novembre 2011

Un café et quelques milligrammes d'endorphines s'il vous plait




Avant-hier j'ai fait un truc de fou. 

J'ai fait du sport. Et croyez moi, vue l'aversion que j'éprouve pour toute activité physique mobilisant plus de trois muscles en même temps ET m'obligeant à porter une tenue adéquate mais moche, c'est vraiment un truc de fou (c'est peut-être pour ça qu'il pleut tellement tiens).

Alors pourquoi me direz-vous ?
Parce que j'attendais sans doute un déclic. Les grossesses, les allaitements (dont encore un en cours), le sédentarisme, les réveils la nuit pour les tétées, la préparation des repas (comprendre : goûter pour vérifier si c'est assez chaud / assez salé / assez cuit / assez sucré / assez onctueux / assez crémeux / assez parfumé... vous saisissez ?) ça va bien deux minutes (ou plutôt dix ans) pour justifier les écarts et les 20 kilos qui m'encombrent. Mais à un moment, faut que ça s'arrête.

Je le sais depuis longtemps, depuis des mois. Sans avoir toutefois trouvé l'envie ni la force de réagir. En ayant un peu pris l'habitude de cette carapace de peau que je trouve laide et que je prends soin de cacher sous mes vêtements.

C'est mon chéri qui m'a donné un électrochoc la veille au soir, alors que je m'apprêtais, joviale, à enfoncer mon couteau dans une barquette de Saint Moret pour agrémenter mon risotto, déjà dégoulinant de fromage gratiné. Un regard et un mot - les premiers - de mon homme ont liquéfié sur place ma jovialité et mon intempérance. 

Alors bien sûr je me suis vexée, bien sûr j'ai repoussé l'assiette et je n'ai rien mangé, bien sûr je suis allée me coucher sans manger mais (largement) drapée dans ma dignité de capitons froissés. Bien sûr j'ai eu faim. Bien sûr je me suis dit "mais comment ose-t-il", "mais qu'il est méchant", "mais qu'il se trompe d'abord", "mais que je suis pas grosse du tout".

Mais après avoir ruminé ma petite vexation bien fat, bien pourrie de vanité, bien pourvue d'oeillères, son regard et ses mots emprunts d'amour ont cheminé en moi. C'était quelque part ça que j'avais besoin d'entendre, besoin de lire dans ses yeux. Son amour, son inquiétude, ma vérité. Je me néglige, je maltraite littéralement mon corps. 

Le lendemain je suis descendue en catimini au rez-de-chaussée, dans une petite pièce pas vraiment emménagée où mon chéri a entreposé deux engins de torture (comprendre : des machines de fitness). La pièce, très sombre, est éclairée par un petit soupirail qui donne sur la vigne du jardin. Je soupirais en regardant le soupirail, consciente que cette petite prison d'effort pourrait peu à peu m'aider à me défaire d'une autre prison, un corps qui ne me convient plus.

J'avais emmené mon iPod et mon iPhone. Par contre je suis restée habillée telle quelle, en robe (oui c'est malin hein) et pieds nus. J'ai mis la musique et j'ai commencé à pédaler. Je m'étais dit à l'avance que pour une première fois, dix minutes ce serait un bon début. Je suis finalement restée 15 minutes, même si ça m'a paru mortellement long (très mauvaise idée de regarder l'heure sur l'iPhone toutes les 45 secondes).

Alors ce que j'en retiens :
- pédaler en musique c'est bien, mais on s'ennuie quand même méchamment. C'est ça que je déteste aussi dans le sport, je ne ressens aucun plaisir à en faire, ça fait mal, ça dure longtemps et on s'ennuie ferme. En salle de sport ou même devant la télé avec un programme de gym, je suis sûre que ça passe mieux.
- il faut bien choisir sa musique, à l'avance. Du rythmé mais pas trop. Je crois que maintenant je connais la cadence qui me convient pour le moment, plus lent ça ne demande pas assez d'effort, plus rapide c'est vite épuisant, et donc décourageant.
- il faut mettre des chaussures. Moches, oui (pour moi toutes les baskets sont moches, sans exception) mais indispensables.

Après 15 minutes d'effort, je suis remontée prendre une douche. Quand je me suis retrouvée devant le miroir, je me suis regardée et j'ai commencé par remercier mon corps. Je ne lui porte ni haine, ni dégoût, ni ressentiment. Il ne me convient plus, certes, mais je ne lui en veux pas pour autant. Au contraire, je lui suis reconnaissante d'avoir porté la vie, à plusieurs reprises. De l'avoir ensuite donné. D'avoir continué à la nourrir. Ces petits bourrelets plein de plis ont aussi fait partie de l'aventure de la maternité. Je les remercie d'avoir fabriqué un nid douillet, d'avoir nourri mes enfants, mais désormais je les autorise à partir. Ca peut paraître bête de faire ça, mais cette étape m'a fait du bien à l'âme, au moins autant que la douche à mon corps.

Quelle étrange expérience d'ailleurs, que de renouer avec des sensations que j'avais oubliées et que j'avais même cataloguées dans le tiroir des choses que je déteste. Solliciter ses muscles, transpirer (certes pas énormément en 15 minutes), sentir son coeur battre aux tempes, boire de l'eau, se doucher après l'effort, boire un café mérité...

Donc ça c'était avant-hier. 
Le lendemain j'ai remis ça. Et aujourd'hui aussi.

Bon cette fois je me suis habillée correctement, je n'y suis pas allée à l'arrache comme la veille ! J'ai attrapé un survêt noir, un t-shirt, mes baskets (qui devaient s'ennuyer ferme, les pauvres), ma musique et une bouteille d'eau. J'ai pédalé pendant 20 minutes hier, 25 minutes aujourd'hui. Je n'ai pas l'intention d'augmenter encore la durée, du moins pas pour le moment. J'ai peur que ce soit la meilleure manière de me décourager dans la longueur. 20 minutes c'est bien.

Par contre la semaine prochaine je rajoute une courte séance d'abdos. Vu leur état, je crois qu'ils me maudiront mais qu'ils m'en seront reconnaissants par la suite...

J'ai aussi pensé à ma meilleure amie qui crapahute régulièrement sur les cimes de montagnes, à la recherche d'oxygène, de sensations fortes, d'efforts et d'adrénaline. Elle m'expliquait, en bonne pharmacienne, que lorsqu'elle ne grimpe pas pendant quelques semaines, elle est littéralement en manque d'endorphines ! Courir, grimper, escalader, transpirer, elle n'imagine pas vivre sans, parce que ça lui fait du bien au corps, au moral, à la tête, à l'âme. 

Alors je vous attends les endorphines ! De pied ferme (et chaussé de baskets).

Le Coup de Patte, qui se donne des coups de pieds aux fesses (je vous laisse visualiser)


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